People/Cinema - Par Mathieu Perrichet - posté le 06/09/2018

Rencontre avec Suzanne Clément, Fred Cavayé, Bérénice Béjo et Doria Tillier

Alors que ce genre de rencontres manquent souvent un peu de spontanéité, de naturel, le cinéaste Fred Cavayé et ses comédiennes, Suzanne Clément, Bérénice Béjo et Doria Tillier sont venus nous présenter leur comédie Le Jeu dans une ambiance pour le moins détendue. Très en forme, voire un chouïa dissipées, ces dernières nous ont offert un entretien un peu débridé, tout en humour et légèreté. Entre les blagues fusantes et les petites remarques piquantes, la joyeuse équipe est malgré tout parvenue à nous donner quelques éléments de réponse à nos questions.

Comment l’idée de faire ce film est-elle née ?
Fred Cavayé : Il s’agit du remake d’un film italien sorti il y a 3 ans et que j’ai découvert il y a 2 ans. Quand je l’ai vu, je me suis dit qu’il y avait dans celui-ci toutes les cases que j’avais envie de cocher : un mélange des genres, des sujets de fond, l’idée de pouvoir réaliser un vrai travail avec les acteurs. C’est ce qui me faisait motivait notamment. Le Jeu est avant tout un film de comédiens. Avec sept solistes qui jouent tous à part égales. Il y a sept premiers rôles.
Doria Tillier : Je trouve que je suis un peu le premier rôle quand même.
Bérénice Béjo : C’est vrai que tu as un peu tiré toute la couverture à toi.
Fred Cavayé : L’important était que les sept comédiens forment un vrai groupe. Il fallait que cela fonctionne. C’est à ce niveau que le choix du casting était important. Il fallait trouver les bonnes pièces du puzzle. Chose que nous avons réussi me semble t-il.
Doria Tillier : En tout cas, nous avons beaucoup ri pendant le tournage. On a eu de la chance.

Qu’est ce qui vous a chacune séduite dans ce projet ?
Doria Tillier : Mon personnage m’amusait beaucoup. C’est une nana enthousiaste, rafraichissante, positive. Parfois quand on joue un rôle, celui-ci s’empare de vous, et là ça a été le cas. Sur le tournage, cette femme déteignait sur moi et ce n’était pas désagréable. Ensuite, la perspective de jouer avec six autres comédiens que je respecte - enfin sauf un que je n’aime pas donc cinq -, c’était génial et super enrichissant. Surtout que ce n’était que mon deuxième film.
Suzanne Clément : Ce qui me plaisait c’était le mélange des genres entre la comédie et le drame. Et que ça bascule de l’un à l’autre. Par ailleurs, mon personnage était le meilleur à mes yeux. C’est une femme qui vit plein de trucs. Elles cachent beaucoup de choses, elle est en souffrance assurément et l’alcool est une sorte d’exutoire pour elle. C’est quelqu’un de complexe et donc intéressant à jouer.
Bérénice Béjo : J’avais très envie de travailler avec Fred depuis longtemps. En effet, je trouvais ces films nuls et je pensais qu’il était temps de relever le niveau. Plus sérieusement, il s’agit d’un des rares réalisateurs français à savoir faire des films dynamiques, efficaces, dans des genres différents. J’aime aussi sa personnalité. Puis, comme il avait du proposer mon rôle à une grande actrice qui a refusé, je suis arrivée en dernier. Ainsi, je savais avec qui j’allais jouer et j’avais très envie de travailler avec chacun des autres acteurs. Tous m’excitaient beaucoup. En fait, ce n’est pas vraiment le scénario qui m’a séduit. Mais ce que Fred pouvait en faire. J’étais persuadée qu’il allait parvenir à donner de la profondeur à tout ça. 

Ce film italien a déjà eu un remake espagnol et à présent un français…
Fred Cavayé : Je crois même qu’il y en a un turc en préparation. Ce n’est pas étonnant. Quoi de plus universel que le téléphone portable de nos jours. Cette histoire parle à tout le monde. Chacun peut se reconnaître, s’identifier à ces personnages. Moi même j’ai été remaké cinq fois car je fais des films avec des sujets que tout le monde comprend. 

A quel point êtes-vous resté fidèle au film l’original ?
Fred Cavayé : En très grande partie. Mais rien que de modifier les comédiens et la profession des personnages, cela change tout. Ce qui est intéressant quand on est réalisateur et que l’on fait un remake c’est qu’à un moment cela devient votre vérité à vous. On oublie l’original.

Sans pour autant la dévoiler, on peut dire que la fin a de quoi étonner…
Fred Cavayé : C’est vrai et je trouvais intéressant d’avoir une fin très ouverte. Nous ne voulions pas d’une happy end…
Suzanne Clément : Cela permet de se poser encore plus de questions. Quelle situation est finalement la mieux ? Savoir ou ne pas savoir ?
Bérénice Béjo : De la sorte, on donne envie au public d’explorer les choses en sortant. On s’interroge.
Doria Tillier : Ça a quelque chose de plus dérangeant.

Quel a été votre principal défi concernant la mise en scène ?
Fred Cavayé : Au niveau de la mise en scène, cela m’a demandé deux fois plus de travail que pour un thriller haletant comme A bout portant. Car il ne faut pas que le spectateur s’ennuie malgré le huis clos et l’unité de temps. Il faut chercher la meilleure façon de rendre une trame narrative non monotone par des jeux de caméras. Ce qui est intéressant c’est que malgré tout, cela reste cinématographique. Puis nous avons tourné chronologiquement. Ce qui a permis de faire évoluer les personnages. Sachant que nous faisions cinquante prises pour chaque scène, donc les comédiens avaient le temps d’inventer, de tester. Ca a été un vrai labo.
Doria Tillier : En revanche, il n’y a pas eu tant d’impro que ça.
Suzanne Clément : Quand on joue de la sorte, chronologiquement, dans un décor unique, cela permet d’être dans la détente car on reste tout le temps dans un état de jeu. C’est hyper riche comme façon de procéder. Je trouve ça très agréable.

Aviez-vous des références en tête en faisant ce film ?
Fred Cavayé : Il faut savoir créer sa vérité et essayer de ne pas se laisser influencer. Je me suis donc interdit de revoir des films en huis clos comme 12 hommes en colèrepar exemple. Tout comme, je n’ai pas voulu revoir le film original. Et j’ai même interdit aux comédiens de le regarder. 
Bérénice Béjo : Oui mais en fait on l’a quand même regardé entre nous en cachette.

Avez-vous déjà une idée en tête pour votre prochain film ?
Fred Cavayé : C’est mon rêve de tourner un western mais honnêtement je ne sais pas encore exactement ce que sera mon prochain film. C’est ce que vous faites sur le précédent qui donne l’envie suivante. C’est pourquoi j’aime changer les styles et brouiller les cartes. Le Jeu sort le 17 octobre. Le 18 je saurai ce que je veux faire après.

Propos recueillis par Mathieu Perrichet

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