People/Cinema - Par Mathieu Perrichet - posté le 19/09/2016

Rencontre avec Xavier Dolan

Juste la fin du monde, septième long métrage de Xavier Dolan, dévoile un drame familial poignant et merveilleusement bien dirigé adapté d’une pièce de Jean-Luc Lagarce.

Quel est le point de départ de ce nouveau film ?
C’est Anne Dorval, qui a joué dans la pièce en 2001, qui m’a parlé de cette œuvre et me l’a recommandée peu de temps après le tournage de J’ai tué ma mère. Lorsque je l’ai lue, je n’ai pas accroché à l’histoire et aux personnages. J’ai fait un blocage intellectuel. En fait, c’est après Mommy que je me suis replongé dedans véritablement et que j’ai su que ce serait mon prochain film. Mon premier film d’adulte.

Comment le décririez-vous ?
C’est un film honnête émotionnellement. Il n’est pas réservé, prude. Il dévoile une sorte d’explosion de mots, de cris, de reproches, de frustrations exprimées de façon pas forcément discrète. Il donne à voir des personnages criards, maladroits. A travers leurs paroles, ils dissimulent leurs douleurs, leur mal être.

Pourquoi avez-vous choisi de filmer essentiellement en plans serrés ?
Pour réduire le rapport du théâtre au cinéma, il fallait réduire l’écart entre la caméra et les personnages. Dans sa pièce, Jean-Luc Lagarce remet en question l’usage de la parole. Le corps et le regard s’expriment tandis que les mots sont déphasés. Cette façon de filmer était donc une manière de dire aux spectateurs qu’ici les mots sont secondaires et que l’important ce sont les regards, ce qu’il y a sous et entre les mots.

Etes-vous vraiment resté fidèle à la pièce ?
Oui au maximum. Je voulais que les mots de Jean-Luc Lagarce soient dits tels qu’ils les avaient écrits. Il n’était pas question pour moi d’édulcorer son œuvre.

Comment avez-vous choisi vos comédiens ?
Les rôles ont été écrits pour ces comédiens. Tout de suite ça a été une évidence, ils se sont imposés à moi. Vincent Cassel est, quant à lui, venu se greffer au projet plus tard à la place de Reda Kateb. Malgré un prestigieux casting, je ne cherchais pas le côté « hyper star ». C’est le physique qui m’intéresse avant tout, l’anatomie d’un visage. J’aime les comédiens avec de l’intelligence, de la matière en eux, capables de multiplier les possibles. Après, avoir de tels acteurs sur un plateau procure un mélange de bonheur et de fébrilité.

En quoi la musique a t-elle de l’importance dans votre cinéma ?
Souvent la musique arrive en amont de l’écriture, longtemps avant même, et il arrive parfois que des scènes soient écrites en fonction des morceaux. J’aime donner l’impression que la musique que l’on entend est celle de la pièce d’à côté par exemple, qu’elle apparaisse comme elle s’inscrit dans nos vies, de manière aléatoire.

Avez-vous fait appel à des références, des modèles, à l’occasion de ce film ?
Non et pour être honnête, je n’ai pas une grande culture cinématographique. Cela fait huit ans que je le répète mais les gens n’y croient pas et continuent de voir dans mes films des références à de grands cinéastes que je n’ai jamais vus.

Propos recueillis par Mathieu Perrichet

A lire également

Juste la fin du monde
Juste la fin du monde

Sortie : 21/09/2016

L’après-midi en famille d’un jeune auteur qui, après 12 ans d’absence, retourne dans son village natal afin d’annoncer aux siens sa mort prochaine.