Les deux acolytes Mehdi Idir et Fabien Marsaud - alias Grand Corps Malade - sont venus nous parler de La vie scolaire, leur nouvelle collaboration derrière la caméra. Avec dans leur besace, trois de leurs acteurs : Soufiane Guerrab, Liam Pierron et Moryfère Camara.
Comment l’idée de ce nouveau film ensemble est-elle née ?
Mehdi Idir : Dès le montage de Patients (ndlr : leur premier long métrage), nous avons commencé à discuter avec Fabien de notre prochain film. Et tout de suite, nous avons voulu que cela se passe dans un collège, avec une femme comme personnage principal. Nous avons alors pensé centrer l’histoire sur une CPE, car c’est un métier dont on parle peu au cinéma. Puis, ce sont ces personnes qui font le lien entre les professeurs, les parents et les élèves dans un établissement. Cela nous intéressait donc, car cela nous permettait d’aborder plein de sujets.
Comment travaillez-vous à deux ? Vous répartissez-vous les tâches ?
Mehdi Idir : Nous formons un couple parfait. Nous n’avons pas de rôle spécifique, nous faisons tout ensemble, mains dans la main. Nous partageons tout. Il n’y a jamais d’engueulade. Une des clés, c’est que nous bossons beaucoup en amont pour ne pas avoir de mauvaise surprise au moment du tournage et pouvoir parler d’une seule voix. C’est plus simple.
Comment vous y êtes-vous pris pour confectionner votre casting de jeunes collégiens ?
Mehdi Idir : Nous avons fait beaucoup de castings sauvages. Nous avons notamment installé un bureau dans une MJC de Saint-Denis où les jeunes qui le voulaient, qui étaient intéressés, pouvaient venir nous voir. Trouver de jeunes comédiens pros n’est pas évident. C’est pour cela que nous nous sommes tournés vers des amateurs. Et clairement, nous avons trouvé des perles rares.
Fabien Marsaud : C’est vrai que dès le départ nous n’étions pas inquiet mais au final c’est allé au-delà de nos espérances. Ils ont été très bons. D’autant que parfois, les conditions étaient compliquées. Nous avons tourné en plein été et nous avons notamment subi de grosses vagues de chaleur.
De quelle façon cette aventure a t-elle débuté pour vous ?
Liam Pierron : A la base, le milieu du cinéma m’était complètement inconnu et me semblait inaccessible. Mais, j’ai un ami qui fait souvent de la figuration dans des clips de rap et qui reçoit régulièrement les annonces de casting. Du coup, un jour, il a reçu celle pour La vie scolaire et comme il n’avait pas envie de prendre le train tout seul, il m’a demandé de l’accompagner. Ce que j’ai fait, en me disant que ça pouvait être drôle. Sur place, on m’a demandé de lui donner la réplique, puis de passer un essai. Je leur ai dit que je n’étais pas venu ici pour ça mais je me suis finalement laissé prendre au jeu. Quelques jours plus tard, on m’a rappelé et j’étais pris. Aujourd’hui, je regrette pas du tout et j’espère continuer dans cette voie. Une vocation est née grâce à Mehdi et Fabien. J’ai d’ailleurs déjà joué dans un court métrage. Par la suite, j’adorerais jouer un journaliste, un jardinier, un cuisinier, etc. Plein de rôles. C’est ce qui est top avec le cinéma.
Moryfère Camara : Moi, je traînais dans la cité comme tout le temps et on m’a dit de venir passer le casting. Du coup, je me suis dit pourquoi pas et que j’allais essayer de faire de mon mieux. Et ça a marché. Ca a été une expérience géniale. Après, je sais pas si je continuerai. Faut voir.
Vous retrouvez-vous dans les personnages que vous incarnez ?
Liam Pierron : Mon rôle est très proche de ce que je suis et de ce qu’a été ma scolarité. Il n’y a pas de grand décalage donc cela n’a pas été compliqué de me glisser dans la peau de Yanis. Ca a été naturel et j’ai apporté un peu de moi au personnage.
Moryfère Camara : Moi c’est pareil. Mon personnage est assez proche de moi. Je suis juste peut être un peu moins bon que lui en cours. Mais je me débrouille pas mal en maths moi aussi quand même.
Est-ce facile de donner la réplique à de jeunes acteurs pour lesquels ils s’agit de la première expérience ?
Soufiane Guerrab : Ce sont des amateurs mais dans leur façon de travailler ils ne sont pas du tout amateurs. Ils sont même mieux que des pros à certains égards. Ils nous ont tous scotchés. Ils ont été très appliqués et impliqués durant tout le tournage. Ca a été un vrai plaisir de leur donner la réplique.
Mehdi Idir : L’avantage avec les amateurs c’est qu’ils sont forcément naturels. Ils ne surjouent pas. Ca facilite les choses.
Tout était-il très écrit ou bien avez-vous laissé place à un peu d’impro ?
Mehdi Idir : Tout était très écrit. Mais au moment du tournage on a parfois laissé les jeunes intégrer leurs propres mots selon les situations. Si cela fonctionnait bien, nous n’étions pas du tout contre.
A t-il été simple de trouver un collège dans lequel tourner cette comédie ?
Fabien Marsaud : Ce film n’est pas une insulte à l’éducation nationale. Au contraire même. Ce qui nous importait c’était d’être juste, crédible, réaliste. Nous voulions montrer tous les aspects de la vie d’un collège de banlieue. Quand nous avons exposer nos intentions à l’établissement dans lequel nous avons tourné, ils ont accepté sans souci de nous confier les clés tout un été.
Etait-ce important pour vous de montrer la banlieue autrement que par l’unique prisme de la violence ?
Fabien Marsaud : Bien sûr. Dans la réalité, la nuance existe, mais pas toujours au cinéma. Cela fait des années que les gens sont baignés dans une imagerie forcément négative de la banlieue, avec des films violents. Alors que, oui il y a des problèmes et on ne le nie pas, mais pas que. Tout n’est pas noir ou blanc. Les choses sont bien souvent plutôt grises et c’est ce que l’on montre.
Soufiane Guerrab : Mehdi et Fabien savent de quoi ils traitent donc tout est maîtrisé. C’est ça qui est bien et qui donne de la force au film.
Fabien Marsaud : En plus, on voulait un film dynamique, souriant. Pour nous, c’était une façon de mettre en avant la sensibilité de la CPE. En provoquant l’ascenseur émotionnel, on crée un contraste intéressant pour toucher les gens.
Comme dans Patients, votre passé de réalisateur de clips se ressent avec quelques parenthèses musicales…
Mehdi Idir : Les moments de musique traduisent le temps qui passe, tout en apportant quelque chose au film. Ils ne sont pas dénués de sens. Nous aimons mettre la forme au service du fond.
A qui s’adresse ce film ?
Fabien Marsaud : Ce film s’adresse à tout le monde. A tous les âges, tous les milieux. Que vous habitiez les Champs-Elysées ou Saint-Denis, à Tarbes ou à Brest, c’est une comédie pour tous.
Quels sont vos projets ?
Soufiane Guerrab : Je serai bientôt à l’affiche d’une série pour Arte. Sinon, je viens de monter un festival de courts-métrages Tapis Bleu à Rosny-sous-Bois qui a pour but de mettre en avant les jeunes talents du cinéma. La condition sine qua non pour être sélectionné c’est de faire jouer dans chaque film des jeunes des quartiers.
Fabien Marsaud : Avec Mehdi, on écrit actuellement une série sur le milieu des humoristes. Ce sera de la comédie. Et on pense également à un prochain film.
Donc toujours inséparables ?
Fabien Marsaud : On s’entend très bien, on est les meilleurs potes depuis toujours, et travailler à deux c’est quand même vachement plus sympa et plus facile donc pas de raison que l’on arrête de bosser ensemble a priori.
Mehdi Idir : Dans la vie, on est tout le temps tous les deux donc autant mettre tout ce temps passé ensemble au service de projets cools.
Propos recueillis par Mathieu Perrichet
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