Papicha

Genre : Drame
Sortie le : 09/10/2019 (01H46)
Réalisateur : Mounia Meddour
Acteurs : Lyna Khoudri, Nadia Kaci, Yasin Houicha…

Alger, années 90. Nedjma, 18 ans, étudiante habitant la cité universitaire, rêve de devenir styliste. A la nuit tombée, elle se faufile à travers les mailles du grillage de la Cité avec ses meilleures amies pour rejoindre la boîte de nuit où elle vend ses créations aux " papichas ", jolies jeunes filles algéroises. La situation politique et sociale du pays ne cesse de se dégrader. Refusant cette fatalité, Nedjma décide de se battre pour sa liberté en organisant un défilé de mode, bravant ainsi tous les interdits.

Bande Annoncehttps://www.youtube.com/watch?v=oRmiR64_sZs



Critique

Par Mathieu Perrichet - posté le 05/09/2019

One, two, three, viva Papicha

Dans les années 1990, alors que les intégristes religieux imposent leurs lois et font régner un climat de terreur, l’Algérie bascule dans le chaos. Les attentats se succèdent. Les droits des femmes sont de plus en plus bafoués. Au milieu de ce sombre tableau, observant avec effroi cette situation, Nedjma, une étudiante, entourée de ses amies, refuse cette fatalité. Passionnée de mode, elle veut coûte que coûte continuer à rire, danser, chanter, s’amuser avec insouciance. A vivre comme bon lui semble, tout simplement, dans ce pays qu’elle aime tant. C’est ce combat plein de dignité, cette lutte formidable que dépeint à l’écran la réalisatrice Mounia Meddour dans Papicha, son premier long métrage. A travers le regard de cette jeune femme insoumise, avide de liberté, débordante de rêves, ivre d’indépendance, ce film montre la descente aux enfers d’une Algérie minée par un contexte politique et social délétère. Surtout, la cinéaste délivre une superbe claque, un somptueux uppercut, en donnant à voir cette force de vie que partage cette bande de filles pétillantes, féminines, audacieuses. En opposition à l’obscurantisme, au fanatisme, à l’extrémisme, l’ignorance, l’intolérance, la bêtise la plus crasse. Dans ces ténèbres qui gagnent inexorablement du terrain comme un poison se propage, ces papichas - jeunes filles belles et libérées en algérois - représentent l’espoir. La petite flamme qui persiste à briller. La petite voix qui refuse de se taire alors que les islamistes vocifèrent et réduisent au silence, par la barbarie, quiconque ne se plie pas à leurs exigences, leurs absurdes diktats. Au dessein mortifère, morbide, macabre des fous de Dieu, qui contrarient des destins et brisent des vies, Nedjma et ses copines résistent et répondent avec leurs armes : une énergie enthousiasmante et une détermination chevillée au corps, malgré une innocence rudoyée, à vivre sans entrave. C’est parfois dur, parfois drôle, souvent émouvant, toujours intense et profondément humain. Présenté dans la section Un Certain Regard lors du dernier Festival de Cannes, Papicha est un film puissant, incisif, noble, remarquablement beau et inspirant. Un long métrage très réaliste qui doit énormément à l’immense talent de ses comédiennes. Dont les personnages qu’elles incarnent ne peuvent que faire écho aux jeunes Algériens qui mènent depuis le printemps leur révolution en quête de plus de liberté. One, two, three, foncez voir ce film !

Mathieu Perrichet


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