People/Cinema - Par Mathieu Perrichet - posté le 08/10/2015

Rencontre avec Marthe Villalonga et Pascale Pouzadoux

Le nouveau long métrage de la réalisatrice Pascale Pouzadoux met en scène Marthe Villalonga dans le rôle d’une femme âgée ayant décidé de mourir dans la dignité.

Quel est le point de départ de ce film ?
Pascale Pouzadoux : La genèse de ce film, c’est la lecture du livre autobiographique du même nom écrit par Noëlle Chatelet en 2005 sur le suicide de sa mère, fervente militante pour le droit à mourir dans la dignité. Le récit raconte les trois derniers jours de cette femme de 92 ans qui a mis fin à ses jours en 2002. On y découvre une personne bien décidée et sans regret. Pour moi, la philosophie qui se dégageait de cette histoire était positive : il faut profiter des gens que l’on aime tant qu’il en est encore temps. J’ai pensé que l’on pouvait en faire un film fort.

Etiez-vous consciente que vous abordiez alors un sujet sensible ?
Pascale Pouzadoux : Aujourd’hui, le droit à mourir dans la dignité est un sujet de société brûlant mais à l’époque, il y a dix ans, ce n’était pas le cas. Le sujet n’était pas encore entré dans le débat public. Finalement, le fait que le film sorte au moment où l’on en parle beaucoup est plutôt une bonne chose. C’est un thème qu’il me semblait important d’aborder.

Malgré le sujet, vous proposez un film plutôt positif…
Pascale Pouzadoux : J’ai tout de suite voulu faire quelque chose de lumineux, vivant, pas pesant parce que généralement les gens qui font ce choix partent soulagés et joyeux. Je voulais donc que le film soit dans cet état d’esprit. La lumière et le rire étaient un parti pris dès le départ. La mort c’est la vie. Pour moi, c’est l’histoire d’une femme qui prépare son dernier voyage. On n’est pas dans le grave et le sinistre. La philosophie qui se dégage de cette histoire c’est qu’il faut profiter de la vie jusqu’au bout. Cette femme voulait que la liberté soit le maitre mot. Elle s’était battu pour l’IVG, l’interruption volontaire de grossesse, et elle avait décidé de se battre pour l’IVV, l’interruption volontaire de vie, comme elle disait.

A travers les différents personnages, vous illustrez les divers points de vue de la société à propos du droit à mourir dans la dignité…
Pascale Pouzadoux : Ce choix était pleinement réfléchi. On a interrogé des gens qui ont vécu cela dans la vie et il était important de mettre en scène les différences d’opinion. Entre celle qui accepte la décision, l’autre qui refuse catégoriquement ou encore celle qui se voile la face en mettant ses parents âgés en maison de retraite…

Pensez-vous que votre film peut faire évoluer les choses ?
Pascale Pouzadoux : Si les gens vont voir le film, cela peut changer les choses car les artistes peuvent faire évoluer les mentalités. Ils sont le reflet du peuple plus que les politiques. Ce long métrage peut faire avancer les consciences. Ce n’est pas du cinéma militant mais le film porte un message très fort.

Comment avez-vous pensé à Marthe Villalonga pour incarner cette femme ?
Pascale Pouzadoux : J’ai rapidement pensé à Marthe Villalonga. J’avais deux, trois autres pistes dont Gisèle Casadesus mais ça n’allait pas avec le personnage que je m’imaginais. Marthe Villalonga est populaire, elle suscite tout de suite la sympathie et était capable de faire rire malgré le contexte. C’est une femme vraie avec un quelque chose de vraiment naturel. Elle était idéale pour incarner cette femme forte et obstinée.

Quant à vous Marthe Villalonga, qu’est-ce qui vous a séduit dans ce rôle ?
Marthe Villalonga : Le personnage de cette femme qui a décidé de partir m’a entièrement plu. Après avoir lu le livre, j’ai eu la même réflexion qu’elle. Je me suis dit que j’aimerais décidé de ma mort comme elle. J’ai été séduite, je me suis vu en elle, je me suis identifiée à cette femme, je me sentais proche d’elle et de sa façon de voir la vie. Le scénario est magnifique et le personnage attachant.

Cela change de la pure comédie dans laquelle on est plus habitué à vous voir…
Marthe Villalonga : Moi ce qui me plait dans ce que l’on me propose c’est le scénario et le rôle, qu’il soit principal ou non et dramatique ou humoristique. Peu importe. Un comédien a envie d’aller dans tous les sens. Là, c’était un beau personnage vers lequel je suis allé comme lui est venu vers moi. Je marche à l’instinct.

A quel point avez-vous été fidèle au livre d’origine ?
Pascale Pouzadoux : La philosophie du geste de Madeleine, de partir dans la dignité, de faire ce qu’elle veut de son corps, est le noyau du livre et du film. Tout le reste avec la famille est inventé. Il y a 50% de la relation mère/fille qui est vraie et 50% des autres générations que j’ai écrits moi-même. On voulait que cette histoire touche toutes les tranches d’âge.

Qu’en a pensé la famille de « la véritable Madeleine » ?
Pascale Pouzadoux : La famille était contente car ils ont trouvé le film très réussi. Cela les a aussi un peu perturbé car ils ont eu l’impression de se voir sans que ce soit véritablement eux. Mais l’important est que je n’ai pas trahi leur histoire.

Mathieu Perrichet

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