Cold Skin

Genre : Fantastique
Sortie le : 17/07/2019 (01H48)
Réalisateur : Xavier Gens
Acteurs : Ray Stevenson, David Oakes, Aura Garrido...

En 1914, alors que le monde se prépare à l’apocalypse, un jeune homme est débarqué sur une île rocheuse et inhospitalière, près du cercle antarctique. Sa mission : remplacer pour les 12 prochains mois l’officier météorologique qui a mystérieusement disparu. Alors que le bateau s’éloigne, il est loin d’imaginer que de terribles créatures ont déjà pris possession de l’île.

Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=VBb2O1_owrc



Critique

Par Jean-Marc Vigouroux - posté le 10/07/2019

Bleu comme l’enfer

Adapté du livre d’Albert Sanchez Pinol, que Xavier Gens confesse avoir commandé à la Fnac en 2013 et immédiatement voulu adapter (sauf qu’à l’époque David Slade, réalisateur de 30 jours de nuit, était sur le coup avant d’abdiquer), Cold Skin, en sus de marquer le retour aux manettes du réalisateur de Frontière(s), est probablement son film le plus abouti. En effet, il est aussi question ici de frontières qu’on repousse, dans l’espace (le colon sur une île aux antipodes), dans l’Histoire (le chaos de la Grande guerre) et dans l’annexion brutale de la nature par la culture (« dresser » une créature humanoïde non répertoriée, comme on le fit autrefois des peuplades indigènes, avant de la rendre esclave matérielle et sexuelle). Si le huis-clos était déjà de mise dans The Divide, il s’agit donc ici de multiplier l’exercice en développant systématiquement un huis-clos (le phare, par exemple) dans le huis-clos (une île isolée balayée par les vents), dans un huis-clos plus vaste encore, « à ciel ouvert », afin de renforcer l’impossibilité de fuir. Une fois passé le premier assaut, terrifiant, le récit, qui risquait de devoir s’enliser dans une guerre de tranchées, entre dans le dur de son sujet : on pense alors forcément à Je suis une légende, Splice ou, mystérieusement, à La forme de l’eau, la force du film tenant plus à son arène (entre Melville et Poe) qu’à son message (les monstres ne sont pas ceux qu’on croit). Etonnamment serein en dépit de la complexité à monter le film, Gens s’appuie sur une direction artistique impeccable et une mise en scène maîtrisée. Côté casting, David Oakes (Les Borgias) tient la route en météorologiste vernien a priori humaniste et Ray Stevenson (Rome) campe avec conviction un Robinson Crusoé misanthrope. Objet de tous les désirs, Aura Garrido (Ghost Graduation) fait mouche en créature étrange et sexy. On regrettera toutefois que la piste du ménage à trois n’ait été qu’effleurée, au profit d’un énième assaut. Dommage, thématiquement.

Jean-Marc Vigouroux