A Casablanca, entre le passé et le présent, cinq destinées sont reliées sans le savoir. Différents visages, différentes trajectoires, différentes luttes mais une même quête de liberté. Et le bruit d’une révolte qui monte….
Bande Annonce : https://www.youtube.com/watch?v=niNnao6OkQo
Liberté, j'écris ton nom
Magnifique. Que dire d’autres ? Avec Razzia, Nabil Ayouch (Much Loved, Les Chevaux de Dieu, Whatever Lola Wants, etc) signe un film remarquable, bouleversant et abouti. Tout en finesse, élégance, sobriété, le cinéaste propose une radioscopie sans concession du Maroc d’aujourd’hui. Un pays à fleur de peau, tiraillé entre le poids de traditions séculaires, la religion, et une soif d’émancipation, de modernité. Sur fond de colère sociale qui gronde, à travers les trajectoires de cinq personnages aussi beaux qu’attachants ; désireux de vivre dignement, paisiblement et d’accomplir leurs rêves ; se révoltant chacun à leur façon contre l’ordre établi ; défiant un système caduc ; refusant de céder à la fatalité, Razzia traite tout simplement de la liberté. Cette liberté à laquelle tout être aspire légitimement. Cette liberté pas si évidente dans un Maroc post-Printemps arabe, pris entre deux feux. Pétri de contrastes et de contradictions. Alors que l’obscurantisme n’est jamais très loin, c’est d’ouverture, de tolérance, d’érudition, d’égalité, d’affranchissement, de vivre-ensemble dont Nabil Ayouch parle. Le sens du discernement en bandoulière, dépourvu de tout manichéisme, il pointe du doigt les travers de la société marocaine, ses tourments, ses incohérences. Il dessine les contours d’une population multiple, métissée et bouscule les mentalités, interpelle avec intelligence. Au bout du compte, le réalisateur offre un long métrage lumineux, généreux, saisissant, transpirant de vitalité. Un hymne à l’espoir, une formidable ode à l’humanité dans toute sa diversité, sa richesse. Une petite pépite qui se place du côté de la vie, du courage, du désir, de l’espérance face à certaines forces annihilantes à l’oeuvre dans l’Atlas comme à Casablanca. Pareil aux phénomènes régissant la tectonique des plaques, le vieux monde sclérosant, violent, discriminatoire qui bride, frustre les individus se voit submerger par l’éclosion d’un monde nouveau. Le tout non sans remous. C’est ce que décrit avec son regard alerte et lucide Nabil Ayouch. Ou quand le mot liberté retrouve tout son sens. Du bon et beau cinéma. Espérons désormais que ce film fasse une razzia au box-office car cela serait mérité !
Mathieu Perrichet